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De Champollion à l'Instruction en famille : l'importance d'une pensée alternative

Champollion : Apprendre au-delà des murs pour changer le cours de l'Histoire

1789: Révolution française. En raison de l'agitation qui bouleverse le pays, les écoles ferment leurs portes. Jean-François Champollion né en 1790 est fils de libraire. Lecteur passionné, il dévore les livres. A 8 ans, l'école ouvre de nouveau ses portes. L'enfant libre en difficulté en calcul et orthographe peine à rester concentré. Il s'y ennuie tant, ne pouvant se consacrer à sa passion des langues, qu'il demande à quitter le lycée. A 15 ans, il est peut être médiocre en mathématique et orthographe, mais il connaît déjà l'hébreu,l'arabe, le syrien, l'araméen, le grec, le latin et l'éthiopien ! 
Dans notre système normatif, il aurait été pourtant qualifié de mauvais élève... 
Sa passion, son entêtement, sa pensée alternative sont pourtant à l'origine de découvertes majeures car c'est lui qui a percé le mystère de l'égyptien antique, lui qui nous permet donc de mieux connaître cette période absolument passionnante qu'est l'antiquité égyptienne ! 
 
Il n'est pas le seul dont la pensée alternative a permis de changer l'histoire ! 
Toute avancée suppose de quitter un sentier battu, quel qu'il soit, pour en explorer un autre ! 

Et pourtant la pensée alternative est de plus en plus combattue ! 
Ainsi, le 2 octobre 2020 fut annoncée la volonté d'interdire l'instruction en famille !
Officiellement pour lutter contre la radicalisation alors qu'un rapport officiel remis après la saisie du Conseil constitutionnel a établi qu'il n'y avait AUCUN lien, AUCUNE menace ! 
Un arsenal juridique existait déjà : déclaration obligatoire, enquête de la mairie, contrôle pédagogique, interdiction de se regrouper à plusieurs familles pour instruire, sévères amendes et même risque de prison.

L'instruction en famille, Apprendre autrement d'Amandine Geers et Raphaëlle Houlette

Un nouvel ouvrage sur l'instruction en famille vient de paraître. Un ouvrage intéressant pour ses témoignages, la pensée alternative et la joie de vivre qu'il dégage. Il est cependant essentiellement centré sur les apprentissages autonomes, apprentissages qu'il sera très difficile de mettre en pratique aujourd'hui en France...
D'ores et déjà bien des familles vont se tourner vers des cours par correspondance ou un modèle d'école à la maison reproduit chez eux. Cela ne garantit ni un accord, ni un contrôle pédagogique positif. L'alternatif, lui, s'effacera un peu plus. 
Or si un modèle ne convient pas à notre enfant, utiliser uniquement ce modèle ne le fera pas correspondre à un moment M. 
Champollion a pu devenir qui il était parce qu'il a pu vivre ses passions. Oui, l'école est utile pour bien des enfants, oui une pensée alternative peut aussi y être présente, mais ce n'est pas le cas de tous. Et nous devrions tous avoir le choix de tenter une autre approche. 
Pour Amandine et Raphaëlle, j'ai témoigné p 71, extraits "Nous avancions sur un chemin balisé, habituel, classique : celui de l'école. [...] Le sentier instruction en famille semblait biscornu, parsemé de ronces. L'école pourtant n'était pas une expérience positive.  [...] Lorsque la cadette est parvenue au bout de ses forces, le choix s'est imposé. Et là, très vite, derrière les ronces, nous avons aperçu un champ des possibles insoupçonné ! Quel monde fabuleux que ce monde de découvertes qui s'ouvrait à nous ! En suivant enfin leur curiosité, en leur permettant enfin d'avancer à leur rythme, d'exprimer et de vivre leur singularité, en respectant leur profil hétérogène, en étant simplement elles-mêmes. Quel bonheur d'apprendre furent ces dix années partagées ensemble ! Ce fut certainement la plus belle période de ma vie. Un bonheur partagé : aujourd'hui adultes, les filles continuent d'apprécier ce choix réalisé ensemble". [...]"Finalement c'est aussi moi-même que j'ai retrouvé, ma curiosité éteinte, mon potentiel étouffé". 
 
En relisant mon témoignage, en découvrant les autres, je me suis souvenue à quel point ce choix était en fait bien plus qu'un choix d'apprentissage alternatif. Lorsqu'il y a eu confinement et école à la maison, il y a eu énormément de confusions. Cette réalité d'école à la maison n'a strictement rien à voir avec le mode de vie "instruction en famille". C'est un peu comme comparer une jardinière sur un balcon et une vie au grand air en vivant de ses cultures. 
L'instruction en famille, c'est bien plus qu'apprendre à la maison lorsqu'on le vit à 100 %, c'est considérer son enfant avec un autre regard, c'est vivre ensemble, grandir ensemble, apprendre ensemble, pas enseigner non, mais apprendre les uns à côté des autres. 
Oui, c'est un mode de vie alternatif et ça peut faire peur, ça peut même rendre jaloux. 
La semaine dernière, je pensais à mettre en valeur le fait que nous étions une communauté, une minorité à préserver comme le précise la loi.  Nous sommes en effet une communauté (avec beaucoup de disparités cependant), une minorité, mais ça va au-delà de la minorité à protéger. 
L'instruction en famille, malgré les peurs, est un mode de vie qui ne fait de mal à personne, c'est même un mode de vie qui nous enrichit tous, tout comme un enfant scolarisé peut enrichir une famille sans école. Nous ne vivons pas les uns contre les autres. Mais comme dit et démontré au début de ce long billet, l'alternatif est INDISPENSABLE.

La nécessité d'avoir le choix

Après des centaines de témoignages, des études, un investissement sans égal mesure des familles, le soutien d'une poignée d'élus, les familles sans école ont réussi à obtenir deux ans de dérogation pour les familles avec contrôle positif et une demande d'autorisation pour les autres... Pour les familles sans handicap, sans éloignement géographique conséquent, sans maladie, sans sport ou arts de haut niveau (= musique car le dessin est bien plus dur à prouver !), il faut désormais avoir le bac ou un diplôme équivalent ET déposer un dossier pédagogique complet. Il faut donc montrer patte blanche.
 
Depuis avant hier et jusqu'au printemps 2023, il n'est plus possible de déposer un dossier pour obtenir l'autorisation d'instruire son enfant.
Les premières réponses arrivent et certaines sont négatives, motif massif de refus "pas de situation propre." Logique avec un regard subjectif, il est très facile de considérer qu'en fait il n'y a jamais de situation propre. Pourtant ce n'est pas ce que dit la loi, puisque la situation propre réside dans le dossier! Le juge des référés a ainsi refusé de suspendre le décret au motif que seuls sont pris en compte "les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de l'enfant", "excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit". Il reprenait ainsi la décision du Conseil Constitutionnel 2021-823 DC du 13 août 2021.    
 
Le découragement va gagner bien des familles qui hésiteront à faire appel. D'autres saisiront une commission qui n'a de commission que le nom ! En effet, en cas de refus, la loi prévoit le recours à une commission de 5 membres (lien ici).  Pourtant, hier une cliente me prévenait : elle va saisir la commission et on lui a annoncé qu'il y aurait un seul membre ! L'aléatoire se poursuit... Si ces problèmes ne sont pas rapidement résolus, il est à craindre un encombrement des tribunaux administratifs pour obtenir le respect de la loi... Ce sera un parcours du combattant pour les familles qui vont oser se battre pour leurs droits et ceux de leurs enfants, mais ce sera aussi un combat essentiel pour avoir le droit d'avoir le choix...le choix d'une pensée alternative indispensable pour un monde qui progresse.
 
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